Offrir un accès à l’internet dans une bibliothèque : conditions juridiques [outil]

Boîte à outils

1. Quelles obligations légales ?

a. Conserver les logs de connexion ?

b. Quelles informations peuvent être collectées ?

Conditions :

  • avec le consentement de la personne. Mais on ne peut pas refuser l’accès à internet aux personnes refusant de consentir [6].
  • pour exécuter un éventuel contrat conclu avec la personne
  • pour exécuter une mission de service public à laquelle participe l’organisation
  • pour exécuter une obligation légale
    • en raison d’un « intérêt légitime ».

Intérêt légitime

Cet intérêt légitime n’autorise que les opérations effectivement utiles pour l’organisation, et dont l’utilité est plus importante que l’atteinte portée à la vie privée des personnes concernées.

S’agissant de l’exécution d’une mission de service public, la collecte de données personnelles doit être indispensable à cette exécution. Par exemple, recueillir l’identité d’une personne porte atteinte à sa vie privée. Mais n’est souvent d’aucune utilité pour les organisations qui fournissent un accès libre à Internet.

En effet, aucune loi n’impose aux fournisseurs d’accès à Internet de recueillir l’identité des personnes utilisant leur service[7]. Cela ne saurait donc justifier une telle collecte (ce n’est que dans des cas exceptionnels qu’on peut obliger un fournisseur de collecter l’identité des utilisateurs, lorsqu’un juge le lui ordonne précisément [8]).

De même, dans la mesure où les fournisseurs d’accès ne sont pas responsables des faits commis par les personnes utilisant l’accès [9], ils n’ont aucun intérêt à pouvoir identifier ces personnes. Ils n’ont donc aucun intérêt à collecter l’identité de tous les utilisateurs pour y parvenir.

Au contraire, dans les cas où, une  organisation souhaiterait ne fournir l’accès qu’à un groupe limité de personnes (celles qui payent, par exemple), l’organisation pourrait avoir un intérêt à obtenir l’identité des personnes. Mais elle devra alors se limiter à collecter les seules informations indispensables à cette fin.

Pour mettre en place une telle restriction, l’organisation doit toutefois pouvoir démontrer que l’objectif poursuivi (sécurité, facturation, etc.) ne peut pas être poursuivi au moyen d’une autre méthode.

Les organisations qui collectent ou traitent des données personnelles sans y être autorisées encourent une amende [10]. Enfin, les communications et données de trafic ne peuvent être traitées que pour des raisons de sécurité, sur l’ordre de la loi ou avec l’autorisation de l’utilisateur.

c. Quelles informations doit-on conserver ?

  • l’identifiant du terminal des personnes utilisant le service (telle que l’adresse MAC de son terminal, utilisée pour lui fournir l’accès) ;
  • un identifiant attribué à chaque personne et à sa connexion (telle que l’adresse IP attribuée à chaque terminal) ;
  • les dates et heures de début et de fin de l’accès à Internet fourni à chaque personne ;
  • les caractéristiques de la ligne attribuée à chaque personne [12].
  • le nom et le pseudonyme de l’utilisateur ou utilisatrice;
  • son adresse postale ou électronique;
  • son numéro de téléphone ;
  • le hash du mot de passe associé à la connexion;
  • lorsque l’accès est payant, le type de paiement utilisé, la référence du paiement, le montant et la date et l’heure de transaction.

  • impose « une conservation généralisée et indifférenciée de l’ensemble des données […] de tous les abonnés et utilisateurs » ;
  • « oblige les fournisseurs […] à conserver ces données de manière systématique et continue » ;
  • « s’applique donc même à des personnes pour lesquelles il n’existe aucun indice de nature à laisser croire que leur comportement puisse avoir un lien […] avec des infractions pénales graves » ;
  • « ne requiert aucune relation entre les données dont la conservation est prévue et une menace pour la sécurité publique ».

d. Sécuriser les postes ?

  • ceux qui mettent en danger la sécurité du service ou du terminal des personnes qui l’utilisent ;
  • ceux dont la loi exige le blocage.

e. Blocage exigé par la loi

  1. la loi HADOPI exige de surveiller son accès à Internet pour éviter qu’il ne serve à commettre des actes de contrefaçon [21]. Or, cette loi ne s’impose qu’aux utilisateurs qui bénéficient de l’accès et non aux personnes qui le fournissent. En effet, en droit, « les personnes dont l’activité est d’offrir un accès [à Internet] ne sont pas soumises à […] une obligation générale de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites » [22].
  2. constitue un délit le fait de mettre à disposition de personnes mineures des contenus « à caractère violent, incitant au terrorisme, pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine » [23]. Néanmoins, la loi prévoit aussi que la responsabilité des personnes qui fournissent un accès ne peut être engagée à raison des contenus qu’elles diffusent [24]. Elles ne sont donc pas concernées par ce délit et, ainsi, ne sont pas tenues de bloquer les contenus concernés.

f. Exception

g. Remettre des informations nominatives ?

2. Le poids de chartes et des règlements

3. Que disent les textes ?

a. La loi anti-terroriste

  • en utilisant localement des unités de stockage dédiées associées à un routeur mis en place pour assurer la répartition du trafic interne entre les différents postes ;
  • en confiant cette obligation au FAI auprès duquel on a acheté des abonnements à plusieurs adresses IP publiques correspondant au nombre de postes ;
  • en confiant l’enregistrement à un tiers prestataire de services.

b. La loi Hadopi

c. Qu’en conclure ?

4. Recommandations, déclarations, articles

a. sources


b. notes

[2] Logs de connexion : Les données relatives au trafic s’entendent des informations rendues disponibles par les procédés de communication électronique, susceptibles d’être enregistrées par l’opérateur à l’occasion des communications électroniques dont il assure la transmission et qui sont pertinentes au regard des finalités poursuivies par la loi.  Cette obligation s’impose à toutes « les personnes qui, au titre d’une activité professionnelle principale ou accessoire, offrent au public une connexion permettant une communication en ligne par l’intermédiaire d’un accès au réseau, y compris à titre gratuit », une définition qui concerne les cybercafés mais également les bibliothèques. Il incombe aux opérateurs de communications électroniques de conserver pour les besoins de la recherche, de la constatation et de la poursuite des infractions pénales :

[3] Les données nominatives seront remises uniquement si celles-ci sont déjà recueillies habituellement.

[4] Une « donnée personnelle » est toute information qui porte sur un individu et qui peut être associée à cet individu, de façon directe ou indirecte.

[5] Les conditions de licéité d’un traitement de données personnelles sont listées à l’article 7 de la loi du 6 janvier 1978
relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

[6] La CNIL considère que « le refus de consentir ne doit pas empêcher la personne d’accéder au service ».

[7] La CNIL a pu rappeler que « le cybercafé en question n’est pas obligé de relever et de conserver l’identité de ses clients pour fournir une connexion (ex : accès Wi-Fi ouvert) » (voir l’article « Conservation des données de trafic : hot-spots wi-fi, cybercafés, employeurs, quelles obligations ? » du 28 septembre 2010 sur cnil.fr).

[8] Par exemple, en application de l’article L. 336-2 du code de propriété intellectuelle, un juge peut ordonner à un fournisseur d’accès à Internet de faire cesser une infraction commise grâce à l’accès qu’il fournit. Le fournisseur peut alors choisir de mettre fin à cette atteinte en sécurisant, par exemple, son réseau à l’aide d’un mot de passe confié à certaines utilisatrices et utilisateurs, une telle mesure ayant été reconnue dans son principe comme conforme au droit européen par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, McFadden, 15 septembre 2016, affaire C-484/14)

[9] Le régime de responsabilité limité des fournisseurs d’accès à Internet est prévu à l’article L. 32-3-3 du CPCE. Il prévoit qu’un fournisseur n’est responsable des contenus qu’il diffuse que si il est « à l’origine de la demande de transmission litigieuse », « sélectionne le destinataire de la transmission » ou « sélectionne ou modifie les contenus faisant l’objet de la transmission ».

[10] À partir du 25 mai 2018, les traitements illicites pourront être sanctionnés par une amende maximale de 20 000 000 € ou 4% du chiffre d’affaire mondial, en application de l’article 83 du règlement général sur la protection des données.

[11] L’obligation imposée aux fournisseurs d’accès à Internet de conserver des données est prévue par l’article L. 34-1 du CPCE (détaillé par le décret n° 2011-219 du 25 février 2011). Ces deux textes ont des conséquences très proches pour les organisations visées par la présente note, et sont donc ici présentées conjointement. Le premier de ces deux textes concerne tout type de communications électroniques, et non le seul accès à Internet : il vise ainsi des données qui concernent d’autres types de communications (des communications téléphoniques), notamment des données liées à des « services complémentaires » et à des « destinataires » qui ne concerne pas l’accès à Internet
et ne doivent pas à être prises en compte par les organisations visées par cette note.

[12] L’obligation de conserver « les caractéristiques de la ligne attribuée à l’utilisateur » ne devrait concerner que les organisations qui fournissent un accès à Internet par câble et qui ont attribué un identifiant unique à chacune des prises qu’elles mettent à disposition du public, ce qui n’est généralement fait que pour répondre à des impératifs de sécurité particuliers.

[13] L’article L39-3 du CPCE et l’article 131-38 du code pénal fixent la sanction attachée à la conservation des données, qui doit être portée au quintuple s’agissant des personnes morales.

[14] La CNIL rappelle l’obligation de ne conserver que les données strictement requises, regrettant que de nombreuses personnes en conservent plus que nécessaire (voir l’article « Internet et wi-fi en libre accès : bilan des contrôles de la CNIL » du 22 décembre 2014 sur cnil.fr)

[15] L’obligation de conserver les données spontanément collectées est prévue à l’article 6, paragraphes II et VI, de la loi du 21 juin 2004

[16] Arrêt Tele2 Sverige (C-203/15) de la Cour de justice de l’Union européenne du 21 décembre 2016, dont sont ici cités les paragraphes 97, 105, 106 et 108.

[17] À partir du 25 mai 2018, les traitements illicites pourront être sanctionnés par une amende maximale de 20 000 000 € ou 4% du chiffre d’affaire mondial, en application de l’article 83 du règlement général sur la protection des données.

[18] Selon l’article 25 de la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la société de l’information (Dadvsi), le titulaire d’un accès à des services en ligne de communication au public en ligne doit veiller à ce que cet accès ne soit pas utilisé à des fins de contrefaçon. Il doit mettre en œuvre les moyens de sécurisation qui lui sont proposés par le fournisseur de cet accès en application de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique. N’étant pas assortie de sanction, cette disposition ne peut pas être mise en œuvre.

[19] Le principe de la neutralité du Net est défini à l’article 3 du règlement 2015/2120 de l’Union européenne.

[20] Décision n° 2009-590 DC du 22 octobre 2009. Loi relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet. Sur le site du Conseil constitutionnel.

[21] Le régime de responsabilisation prévue par la loi HADOPI est prévu à l’article L. 336-3 du code de propriété intellectuelle.

[22] L’absence d’obligation des fournisseurs d’accès à Internet de surveiller les contenus est garantie à l’article 6, I, point 7, de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique.

[23] Le délit de mise à disposition de mineurs de certains contenus est défini à l’article 227-24 du code pénal.

[24] Le régime de responsabilité limité des fournisseurs d’accès à Internet est prévu à l’article L. 32-3-3 du CPCE. Il prévoit qu’un fournisseur n’est responsable des contenus qu’il diffuse que s’il est « à l’origine de la demande de transmission litigieuse », « sélectionne le destinataire de la transmission » ou « sélectionne ou modifie les contenus faisant l’objet de la transmission ».

[25] L’obligation de proposer des filtres aux utilisateurs est prévue à l’article 6, I, point 1, de la loi du 21 juin 2004

[26] En application de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, est opérateur « toute personne physique ou morale exploitant un réseau de communications électroniques ouvert au public ou fournissant au public un service de communications électroniques »

[27] La notion de groupe d’utilisateurs prédéfini est détaillée aux points 10 à 12 des lignes directrices du BEREC quant à l’application de la neutralité du Net, traduites par l’ARCEP.

[28] Loi Hadopi. Décret du 5 mars 2010 Les données conservées par les agents assermentés travaillant pour les ayants droit : date et heure des faits ; adresse IP des abonnés concernés ; protocole pair à pair utilisé ; pseudonyme utilisé par l’abonné ; informations relatives aux œuvres ou objets protégés concernés par les faits ; le nom du fichier présent sur le poste de l’abonné (le cas échéant) ; le nom de son fournisseur d’accès à internet. Les données à fournir à la Hadopi par les FAI : noms et prénoms de l’abonné, son adresse postale et son adresse électronique ; ses coordonnées téléphoniques et son adresse d’installation téléphonique.

[29] La confidentialité des communications électroniques est garantie à l’article 5 de la directive 2002/58 de l’Union
européenne, en partie transposé aux articles L. 32-3 et L. 34-1 du CPCE.

[30] La CNIL considère que « le refus de consentir ne doit pas empêcher la personne d’accéder au service ».

[31] Loi n°2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme et portant dispositions diverses relatives à la sécurité et aux contrôles frontaliers. Sur le site Légifrance.

[32] Les lieux d’accès public à l’internet. Recommandation du Forum des droits sur l’internet, 28 décembre 2007. Sur le site du Forum des droits sur l’internet.

[33] Loi n° 2009-1311 du 28 octobre 2009 relative à la protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet. Sur le site Légifrance.

[34] La bibliothèque titulaire d’un abonnement encourt des sanctions pénales : une contravention de 5ème catégorie (amende de 1500€), une coupure de l’accès à Internet d’un mois et une obligation de mettre en œuvre un « moyen de sécurisation » labellisé par la Hadopi.